Du feu de Dieu, de Jean-Pierre Rumeau

Patrick Patras, jeune prêtre de la région de Fontainebleau à la foi chancelante, voit tous ses repères religieux voler en éclat en assistant au meurtre sauvage de son mentor, le père Rémy, par deux femmes qui le plantent à la porte de l’église avant de l’émasculer. Lui-même grièvement blessé échappe de peu à la mort. Incapable de reprendre pied, persuadé que Dieu lui-même l’a abandonné, Patrick s’enfonce dans le déni, le rejet, en proie à l’alcoolisme et à la violence, au point que l’évêque le force à prendre du repos. Mais le prêtre n’aspire qu’à une chose : retrouver les meurtrières de Rémy et les faire payer cher, quitte à renier tout ce qui faisait de lui un homme d’église. Lorsqu’un imam est à son tour assassiné, peut-être en représailles dans une région où les identités religieuses sont exacerbées, les certitudes de Patrick vacillent, d’autant qu’un commissaire de police, Manuel Bossost, un peu trop familier à son goût, commence à s’intéresser à lui.

En refermant Du feu de Dieu, j’avoue qu’un certain embarras m’a envahi : je ne savais pas trop comment chroniquer ce roman. Si la première partie, avec l’assassinat du père Rémy et la dégringolade de Patrick, est assez réussie et nous montre un jeune prêtre allant jusqu’à l’apostasie, se vautrant dans l’alcoolisme et renonçant au vœu de chasteté, en revanche la suite fait retomber rapidement le soufflé. Je me suis perdu dans les errances du personnage, la longueur de certaines scènes qui n’apportent rien au récit en particulier sur le bateau qui lui sert de refuge. Patrick erre de droite et de gauche, fait des rencontres, retourne voir son frère, et le lecteur finit par oublier le motif de son état puisque l’enquête et la vengeance semblent devenues secondaires. L’arrivée du commissaire de police n’arrange pas les choses. Manuel Bossost a un côté attentiste, observateur, à la lieutenant Columbo mais sans le talent. Lui aussi veut arrêter les meurtrières mais il est prêt à tous les excès et tous les dérapages pour y parvenir. Sa familiarité avec Patras est un peu trop surfaite à mon goût, de même que sa proximité soudaine avec Léna, la jeune femme handicapée qui habite sur la péniche à côté de Patrick. La fin permet heureusement à l’auteur de rebondir jusqu’à l’ultime confrontation entre le prêtre et ses deux agresseuses et l’explication de ce déchaînement de violence.

En conclusion, une lecture en demi-teinte pour moi. Ce n’est pas l’écriture qui est en cause, Jean Pierre Rumeau a un style agréable et sans excès ni redondance, c’est plutôt le parti-pris scénaristique qui m’a dérangé. Comme toujours chez Taurnada, impression et couverture superbes avec cette identité visuelle que l’on apprécie et que l’on identifie immédiatement. Je les remercie une nouvelle foi pour leur confiance.

Jean-Pierre Rumeau – Du feu de Dieu – Éditions Taurnada, avril 2025, 10,90€ – ISBN 978-2-37258-148-6

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