Diane, éditrice chez Sandwood Publishing à Londres, reçoit un manuscrit anonyme. Une jeune adolescente, Sarah, y confie sa vie de misère dans les années sombres de l’Angleterre des années 60. Elle y avoue aussi les crimes qu’elle a dû commettre pour échapper à son destin. Vraie confession ou habile fiction d’un écrivain contemporain ?
Bouleversée par ce manuscrit, Diane cherche à en retrouver l’auteur et part sur les lieux où Sarah dit avoir vécu et souffert. Dans sa quête de vérité, elle traverse les paysages époustouflants d’Irlande et d’Écosse.
Mais ce qui commence comme une enquête littéraire vire à l’horreur. En ouvrant le journal de Sarah, Diane a poussé la porte de l’enfer… c’était hier et rien n’est effacé. Aujourd’hui encore, des forces obscures manœuvrent dans l’ombre pour dissimuler leurs crimes.
Ce roman possède d’indéniables qualités et je l’ai apprécié à plusieurs niveaux.
Tout d’abord, l’écriture : fine, agréable et qui sait se faire dure quand le propos le justifie. L’autrice (enfin, les deux auteurs écrivant sous ce pseudo) a su à merveille rendre l’ambiance des années ’60 et le ressenti qu’une jeune fille comme Sarah pouvait avoir de sa vie et du monde qui l’entourait. L’immersion dans l’époque et l’identification au personnage se fait naturellement, sans heurts. Je me suis vite surprise à ressentir les mêmes émotions que Sarah.
Ensuite, l’aspect historique et la fresque sociale : tout comme le film Magdalene sisters, Souviens-toi de Sarah explore avec brio et empathie le sort réservé aux « mauvaises filles », aux « filles-mères » dans le Royaume-Uni de la fin des années ’60. Sarah est un peu l’archétype de ces pauvres adolescentes brisées par l’hypocrisie et la rigueur ambiantes. Pour cette raison, on pardonne à l’autrice d’avoir parfois un peu forcé le trait sur les événements et les malheurs qui frappent la jeune fille.
Les notables, les riches, les religieux, tous en prennent pour leur grade dans cette dénonciation virulente et passionnée de ce que les gens de peu ont pu subir à cette époque, la manipulation, les abus et les maltraitances qu’on leur a imposés. À ce titre, le roman prend presque des allures de pamphlet accusateur. C’est très réussi.
En revanche, les chapitres se déroulant à notre époque sont bien moins réussis. L’autrice a voulu insuffler des moments d’humour qui, à mon sens, ne s’accordent pas du tout avec le reste et tombent systématiquement à plat. De plus, les relations bizarres de Diane avec ses employés n’apportent rien au récit et m’ont paru plaquées là artificiellement.
Malgré ce défaut, Souviens-toi de Sarah reste un roman intéressant et qu’on n’oublie pas de sitôt !
Souviens-toi de Sarah de Page Comann, M+ éditions, ISBN 978-2382111383, prix 9,90 €